Portfolio – Haiti 2

Acte de soin et d’échange social, coiffer rythme le quotidien. Pas un jour ne passe sans que les femmes et les petites filles ne s’occupent des cheveux l’unes de l’autre.

Colibri est le nom que les Caraïbes ont donné à cet oiseau, le plus petit qui existe au monde, et le seul à savoir voler en marche arrière.

Un peu de poésie dans l’agitation de l’île.

Pour tuer le temps, on joue, inlassablement. Les règles s’apparentent aux “Petits chevaux”. Le premier à avoir rapatrié tous ses pions gagne. Chacun son jet de dé stylé et personnel. On s’emballe, on s’accuse de tricherie, on hausse le ton, on rigole et tout se mélange.

En Haïti, île entourée d’eau, on est paradoxalement pas à l’aise à son contact. Le Vaudou y voit la présence des Lwa, esprits pas toujours bienveillants.

Un mélange de curiosité et d’énergie : ici comme ailleurs, un enfant reste le même.

Mais ici, les enfants grandissent (trop) rapidement. Le système d’obéissance pyramidal (on ne remet jamais en question ses aînés) pousse à se forger vite.

Derrière une apparente confiance en soi, la fragilité de l’enfant persiste pourtant toujours.

Le terrain de foot concentre l’activité du quartier le soir, autour des matchs quotidiens. La journée, il sert de terrain de jeu aux gosses qui tuent l’ennui en bricolant des cerfs volant avec 3 fois rien, créativité oblige.

On crée. On crée pour résister, pour s’occuper. On crée pour se purger.

Les textes au brouillon jonchent le sol de la chambre d’un jeune slameur de la famille. Le soir avec son collectif ils déclament leurs textes tranchants dans un bar au bord de la plage.

“En moi je sens une douleur, Une douleur causée par l’homme d’aujourd’hui qui affaiblit mon cœur. Ils s’entretuent. C’est l’homme contre l’homme […] Comment serait l’homme de demain ? Serons-nous une génération de latrine ? Serons-nous une génération de conards ? Serons-nous une génération de charognards ? Ou pire que ça, bordel de merde. Dis moi comment serait l’homme de demain? […]”

Extrait de “L’homme de demain” – Rood El Sleek

“Tout le monde en Haïti est vaudouisant”. Peu visible de l’extérieur, le Vaudou fait pourtant partie intégrante des croyances, il conditionne les actes de l’existence de chacun et détient le pouvoir de vie et de mort.

La beauté naturelle n’est malheureusement pas un bouclier contre la pollution… En Haïti, les priorités sont évidemment ailleurs que dans l’écologie.

Faut-il résoudre tous les autres problèmes économiques (et ceux qui en découlent) avant de s’attaquer au problème ? Ou ce combat doit-il être mené en parallèle car considéré comme interdépendant ?

Dans la montagne, sur les Hauteurs de la Fondation Seguin, il fait plus frais et ça fait du bien.

Ici, les enfants qui aident leurs proches à travailler la terre portent déjà sur leurs corps les traces du dur labeur. Mais ils gardent le regard droit.

La route qui longe la côte : à la fois sublime et dangereuse car empruntée par tous, à toute vitesse, à toute heure, avec ou sans lumières, sans casque et sans voir ce qui vient en face.

C’est le prix de l’intensité du “frisson haïtien”, cette sensation de devoir vivre le moment entièrement, tout le temps.